Bonjour à tous,

 

Aujourd'hui je vais aborder le frein n°3 que j'appellerai : j'ai mes amis pour parler.

 

En effet, l'écoute voir les conseils d'un(e) ami(e) font du bien et l'amitié fait partie de ce qu'il y a de plus précieux dans la vie, selon moi. Un ami ça épaule, ça réconforte, ça partage. Alors pourquoi ça ne serait pas suffisant ? Pourquoi s'embêter à payer quelqu'un pour nous écouter ? La question est légitime.

 

Et bien parce qu'un thérapeute et un ami se sont deux postures bien différentes. D'un côté vous avez un professionnel, de l'autre non et ça change tout.

 

La séance de psychothérapie c'est un espace à votre disposition pour être vous-même. Alors oui, avec certains amis on peut trouver qu'on est pleinement soi même donc on peut se dire, non, non mais je ne vois pas la différence, hein. En effet, comme le psychologue, l'ami(e) fait preuve d'empathie à notre égard. En revanche, le psychologue va aussi prendre en compte votre structure de personnalité et vos mécanismes de défenses. Alors, me direz-vous, oui enfin bon, les psychologues ont des ami(e)s aussi donc... Oui, ils font généralement attention à ça aussi avec leurs amis, néanmoins, c'est la posture qui change tout. Un psychologue avec ses amis est un ami, il n'est pas psychologue. D'ailleurs le psychologue n'entame pas de travail thérapeutique avec ses proches.


Je vais donc vous expliquer  en quoi ça change tout :

 

L'ami(e) (partons du postulat qu'il vous veut du bien, que ce soit un véritable ami donc l'ami s'inscrit dans une relation égalitaire. Il y a de la réciprocité. Mais lorsqu'il prend une posture de thérapeute, il dévie de cette position égalitaire en la rendant asymétrique car il se place en sachant qui supposément saurait mieux que l'autre, en l'occurrence vous, ce qui est bien, ce qui est bon pour vous. Je le vous dis tout de suite : attention aux dérives d'emprise. On y reviendra.

 

Le psychologue, il est formé à entendre ce qui n'est pas formulé dans le discours et il pose des questions pour apporter un regard nouveau.

On ne le connaît pas et il ne vous connaît pas. Justement, il va apprendre à vous connaître mais uniquement par votre prisme et non par celui de votre entourage. Il pourra donc vous apporter une écoute la plus neutre possible car il n'y aura pas d'enjeu affectifs pour lui et il ne sera pas biaisé par la vision de votre entourage sur vous. Vous arriverez donc comme une page blanche, sans les attributs sociaux qui vous définissent habituellement. Vous n'êtes plus la femme de, le compagnon de, la fille de, le frère de, la supérieure de, l'employé(e) de, etc. Vous n'êtes plus dans une case, il ne vous attribut pas le tempérament que d'emblée vous proches vous attribue. Vous avez saisi le procédé, hein : vous êtes vierge de toute représentation. Et c'est important car elles participent parfois à un enferment ces représentations. Mais le plus important ça n'est pas tant cela, ce qui est le plus important c'est qu'il va s'agir de votre discours et donc de votre vérité. C'est celle-ci dont il est question en thérapie et non de LA vérité.

Personne ne change parce qu'il connaît la vérité mais bien parce qu'à travers sa vérité il fait l'expérience que le changement serait effectivement bon pour lui. Je vous prends un exemple générique pour illustrer : les addictions. On sait tous qu'une addiction ça nous détruit, à petit feu ou rapidement, ça dépend de sa nature. Mais lorsque l'on est aux prises avec une addiction, le savoir (donc la vérité, universelle, scientifique, bref appelez là comme vous voulez) donc la savoir, ça ne nous fait pas changer nos comportement néfastes. Ça ce saurait, parce que justement ça ne vient pas encore (je me permets de dire encore car un changement est possible), ça ne vient pas encore, résonner avec notre vérité. Et c'est là que la fonction tierce du thérapeute est opérante.

 

Son travail ne va pas consister à vous faire culpabiliser, à vous donner un ultimatum pour arrêter, à vous plaindre pour la détresse ressentie ou que sais-je encore. Or, c'est ce qu'un ami peut faire, ce n'est ni bien ni mal, c'est juste que c'est place. L'ami(e) vous aime, il souffre de vous voir dans une situation difficile. Il se situe sous l'angle de la moralité, c'est-à-dire du bien et du mal. Alors que le thérapeute non. Il ne vous veut pas du mal mais ne vous veut pas du bien non plus. Alors, attention, ça ne veut pas dire qu'il est complètement neutre à votre sujet, mais il ne se situe pas sur un angle moral. En tant qu'être humain, évidemment, il espère pour vous que vous fassiez les choix qui vous feront du bien mais il ne voudra jamais à votre place. C'est de cela dont il s'agit lorsque je dis, il ne vous veut pas non plus du bien. Là où l'ami(e), pris dans son affection vous veut forcément quelque chose. Ça n'est pas malsain, tant que ça ne dépasse pas une certaine limite, qu'il n'essaie pas de vous manipuler ou vous mettre sous emprise "pour votre bien'". Le thérapeute ce qu'il ressent pour un patient qu'il apprécie, c'est un amour sans feu, sans passion si l'on veut, d'où il exclut d'office le passage à l'acte. Quand on est clair avec ça, on a posé les bases d'une relation saine. Le thérapeute vous permet de bénéficier d'un moment privilégié avec vous-même, accompagné de quelqu'un d'entièrement disponible pour ça le temps que dure la séance.

 

 

Le psychologue ne nous invite pas à la culpabilité, comme je le disais, il ne nous invite pas non plus à un besoin de coller à ses supposées attentes, ni même à être d'accord avec lui (d'ailleurs, d'où l'intérêt de ne pas connaître ses opinions personnelles), il ne met pas non plus ses humeurs en avant. Le psychologue ne vous situera pas sur ce plan moral. Il vous mènera sur des pistes de réflexion pour vous aider à entrevoir par vous-même si tel ou tel choix vous fait du bien ou vous fait du mal. Ce qui est différent. Le thérapeute ne va pas chercher à vous rallier à sa cause car il voudrait que vous l'aimiez comme peut l'attendre un ami. Il ne cherche pas à vous manipuler même inconsciemment car le but d'une thérapie c'est de rendre le sujet autonome psychiquement donc libre. Le thérapeute est un outil au service de votre introspection. Alors, évidemment, ne le déshumanisons pas et soyons au clair sur ce qui se joue pour le patient. Il n'entrevoit pas le thérapeute comme seulement un outil et heureusement d'ailleurs parce que c'est par sa manière d'interagir avec lui que le thérapeute va mettre en lumière son mode de fonctionnement.

 

 

J'ouvre une parenthèse : attention à ces ami(e)s qui prennent ce rôle de thérapeute entre guillemets très à cœur. Ceux-là n'y mettent souvent pas de limites. L'impossibilité à mettre une limite signe une fragilité et alimente un mécanisme pervers de dépendance. Dépendance partagée car les deux ami(e)s alimentent leur besoin, l'un d'avoir la disponibilité presqu'inconditionnelle de l'autre et pour l'autre d'être l'oreille indispensable à la survie de l'autre. Etre psychologue ça ne s'improvise pas, c'est un métier, sinon attention aux dégâts (pour les 2).


Cela dit si c'est le cas et qu'il en prend conscience, s'il est capable de reconnaître qu'il va trop loin, vous avez de la chance, vous avez donc un ami qui vous respecte. On ne va pas se leurrer, on fait tous des erreurs, l'important c'est de le reconnaître et de tenter de ne pas les répéter. En revanche, si votre ami(e) a conscience du mécanisme d'emprise qu'il opère sur vous et qu'il continue d'en user, attention vous avez affaire à un mécanisme pervers. Je ne dis pas que votre ami(e) est un pervers mais je dis qu'il utilise des procédés pervers. Et là, on ne peut plus parler d'amitié. Alors en revanche, les mécanismes pervers dont votre ami(e) userait sans en avoir conscience sont tout aussi néfastes mais on ne peut pas remettre en question l'affection qu'il vous porte. Si jamais vous repérez de tels comportements n'hésitez pas à lui en faire part.

 

Je referme la parenthèse.

 

 

 

 

L'intérêt aussi de ne pas connaître personnellement le thérapeute et donc de le distinguer de l'ami(e), c'est que ce qui se joue pendant les séances, n'impactera pas directement votre réalité quotidienne. Il y aura les répercussions qui impacteront les séances bien sûr et les changements qui s'opèreront en vous et évidemment cela viendra redéfinir a posteriori vos relations et vos choix de vie mais vous ne vous trouverez pas confronté(e) à l'ami(e) à qui vous avez confié quelque chose d'extrêmement intime qui changera de perception sur vous.

Quoi qu'on en dise, ou dont parfois certains sont convaincus mais c'est un leurre, les ami(e)s ont des attentes, plus ou moins conscientes certes, mais bien réelles. Sinon, il n'y aurait pas de mouvement émotionnel envers ces personnes. Le thérapeute n'a pas d'attente affective à votre égard. Il sait qu'il n'est pas votre ami(e) même s'il peut vous apprécier beaucoup, il sait que vous ne faites pas partie de son cercle d'intimes. Et pour cause, la relation n'est pas égalitaire, il ne vous raconte pas sa vie, vous ne connaissez pas les secrets de son coeur. C'est ce qui lui permet d'être dans une relation complémentaire avec vous. Il vous donne la possibilité d'être pleinement vous-même sans vous souciez de ce que ça peut lui faire à lui, parce que vous le payer pour ça. Alors évidemment, les thérapeutes ont aussi leurs limites. Mais qu'ils sont capables d'exprimer au patient pour maintenir un rapport respectueux.

 

Avec l'ami(e), les effets dans votre réalité quotidienne sont immédiats, du fait des attentes, elles même du fait de l'affect.

 

La confidence auprès du psychologue est sans conséquence contrairement à celle délivrée à l'ami(e).

 

Le transfert (c'est ce qui va se jouer émotionnellement dans l'interaction entre le patient et le thérapeute) existe dans toute relation donc évidemment votre thérapeute ressent des émotions vis-à-vis de vous mais la différence d'avec l'ami(e), c'est qu'elles sont maîtrisées par le cadre thérapeutique. Justement pour vous laisser suffisamment de place. Le thérapeute en est garant. Il ne va pas prendre directement pour lui les mouvements violents qui peuvent vous traverser ou tout autre sujet que vous pourriez amener. Il est formé à prendre du recul sur ce qui agit émotionnellement pour lui par rapport à vous. Alors, il est tout aussi impliqué émotionnellement durant les séance qu'un ami mais de ces émotions il en fait son outil de travail pour s'interroger sur votre problématique. Et passé le moment de la séance, il s'en décentre. C'est rendu possible parce que le psychologue est censé bien se connaître et être au clair avec ce qui se joue chez lui et aussi parce qu'il est supervisé.

 

Quand l'ami(e) se place en thérapeute, même avec la meilleure volonté du monde, il lui est difficile de prendre suffisamment de recul. Trop d'affects sont à l'œuvre, trop d'enjeux par rapport à la dynamique de la relation. Et prendre une position de thérapeute auprès d'un ami c'est donner la possibilité d'exercer une sorte d'emprise sur celui-ci et c'est dommage.

 

Le thérapeute peut également être pleinement honnête avec son patient sans craindre de le perdre. Bien sûr un patient peut stopper une thérapie si le psychologue lui a dit quelque chose qui lui a déplu. Evidemment le thérapeute ni sera pas indifférent mais encore une fois ce sera maitrisé. Ce ne sera pas un drame, ce ne sera pas vécu comme un abandon. Il sait où est sa place. Il sait également quand il peut dire ou non les choses car il a conscience que la temporalité de chacun est à respecter. Mais par exemple, il ne se fera pas complice d'une plainte comme pourrait le faire un ami qui a peur de voir se briser un lien parce qu'il aura dit quelque chose qui a déplu. Justement parce qu'il n'a pas cette relation d'amitié à préserver. Vous avez affaire à un professionnel que vous payer. Ça remet les choses dans leur contexte.

 

Un autre point : Votre ami(e) sera mû(e) par l'affection qu'il vous porte et ses bonnes intentions. Il sera prompt à vous donner des conseils sans savoir si ceux ci respectent vraiment l'individu que vous êtes. C'est un réflexe automatique face à des proches de vouloir leur venir en aide mais ça n'est pas toujours approprié. Le thérapeute n'est pas dans cette démarche là. Il vous accompagne par ses questionnements à creuser votre réflexion jusqu'à ce que vous arriviez par vous-même à la compréhension et à la résolution du problème. Là où l'ami(e) vous donnera une solution à court terme. Il n'y a aucun jugement là-dessus, en tant qu'amie c'est aussi ce qui m'arrive de faire mais la posture de thérapeute invite à tout autre chose, parce que la thérapie c'est un TRAVAIL donc on prend le temps. L'écoute thérapeutique dépasse l'écoute bienveillante de l'ami(e). L'ami(e) a autre chose à faire que de consacrer ce temps à ce travail, il est là pour accompagner différemment.

 

 

 

L'ami(e) peut aussi s'offenser de ne pas avoir été suivi sur son conseil car cela a des répercussion sur sa vie à lui aussi parfois, alors que le thérapeute ne s'en offense pas. Il sait que le processus de changement est quelque chose de très personnel, que ce qui convient à l'un ne convient pas à l'autre mais surtout grande différence : cela n'affecte en rien sa vie personnelle. Il est garant de la liberté subjective de chaque patient mais pour l'être il doit conserver cette distance qu'offre le cadre thérapeutique. Par ailleurs, pour le patient, il est quand même bien souvent plus facile d'accueillir une remarque de la part de quelqu'un éloigné de son entourage que de quelqu'un de proche, pensez aux rapports familiaux si ça peut vous aider. Encore une fois parce que la charge émotionnelle est différente.

 

Le psychologue ne projette pas des choses personnelles sur vous. La projection (c'est le fait d'attribuer à l'autre ses propres sentiments) c'est un mécanisme quasi inévitable, lorsque l'on n'y est pas attentif, c'est humain. Tout le monde projette plus ou moins lorsque les affects sont conséquents. L'important c'est d'en être conscient pour rectifier le tir. Lorsque l'on n'en est pas conscient ça brouille le rapport. Là où l'ami(e) y apporte une vigilance dans le meilleur des cas, le psychologue est extrêmement attentif à cette manifestation. Donc il est toujours vigilant à ne pas interférer par son vécu ou ses opinions dans la thérapie. S'il donne des informations le concernant, il le fait toujours avec parcimonie et à dessein pour servir la thérapie et non pas pour se faire connaître. C'est pour laisser toute la place à la subjectivité du patient. C'est grâce à cela que le thérapeute peut se dégager du jugement et ne pas interférer sur vos décisions.

 

 

L'outil de changement le plus important c'est la relation qui se crée entre le thérapeute et son patient, c'est pour cette raison qu'il est primordial qu'elle soit saine. Et c'est aussi pour ça qu'il ne faut pas hésiter à changer de thérapeute si celui que vous avez rencontré ne vous convient pas. Vous savez, un bon thérapeute, alors mis à part évidemment les prérequis qui sont la formation et les compétences, c'est le thérapeute qui vous convient. S'il ne vous convient pas, ce n'est ni sa faute ni la vôtre, ça ne se situe pas sur ce plan là (en tout cas la majorité du temps), c'est une question de compatibilité ou non.  Et ce n'est pas grave. Alors, c'est agaçant, oui, parce que trouver un thérapeute qui nous convienne ça peut parfois être assez compliqué mais il n'y a pas péril en la demeure.

La thérapie c'est une rencontre entre deux (ou plus ça dépend du contexte) être humains dans un cadre défini. Et c'est ce cadre qui permet l'émergence d'un travail sain et pourvoyeur de changement. C'est la rigidité perçue de ce cadre qui permet justement la liberté d'être pleinement soi-même durant les séances. Le cadre est garant d'un environnement sécurisant.

 

 

Prendre en charge un ami ce n'est pas toujours lui rendre service car ce qui crée la possibilité d'une vraie amitié saine et qui protège l'être aimé(e) des dérives de la toute-puissance, c'est le respect de la liberté de son désir. Qu'entre parenthèses, je ne peux pas connaître car lui-même ni a pas toujours accès. Et c'est justement ce que l'on vient mettre à jour dans un travail thérapeutique. Il existe une amitié thérapeutique, dès lors qu'elle respecte la position égalitaire. Elle est précieuse mais ne peut jamais se substituer à un travail thérapeutique, qui lui se réalise avec un professionnel.

 

 

Voilà, j'espère que ça vous aura apporté un éclairage sur la différence de places entre l'ami(e) et le thérapeute !

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Podcast : Les freins à la thérapie


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Frein n°3 J'ai mes amis pour en parler


Psychologue clinicienne - Psychothérapeute


N° RPPS 10009541920

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